|||| |||| |||| |||| |||| |||| : La Fin De Notre Monde

La Fin de notre Monde. Je l’avais entendue narrée moins de deux minutes auparavant et déjà elle me glissait de la mémoire. J’essayai de la retenir, furieux à l’idée de la perdre, mais impossible de garder le grappin dessus. Sur rien d’autre, non plus : on me raconta plus tard toutes sortes d’absurdités que j’avais déblatérées pendant la période où l’amnésiant fit son effet et je ne m’en souvenais d’aucune.

Frustré, je conservais cette idée qu’on m’avait passé un message dont les termes exacts n’étaient pas importants mais dont l’esprit s’avérerait crucial. Une information d’aucune valeur, donc.

Je ratai tout le détail du reste de l’assemblée décisionnaire. Bhdra me la résuma, aidée par son carnet où les trois colocataires s’étaient arrangées pour se tenir au courant.

Un nouveau statut légal se créait pour les fusions, profitant du fait que Koretti avait fait valider la sienne sous un régime exceptionnel ; Bhdra, Omi et Zû y tombaient, ce qui accordait enfin à leur vie une autre valeur que celle d’affabulation.

Les personnes représentantes des laboratoires concernés par l’affaire présentaient leurs excuses pour tout ce bazar et l’attitude parfois à la limite du mafieux de leurs directions ; elles promettaient de mieux faire à l’avenir. Je me notai de garder un œil sur l’industrie.

Je quémandai un tête-à-tête avec Omi mais ça ne se passa pas. Mon double, mon frangin, mon je-ne-sais-pas-quoi-nous-vivons-décidément-dans-un-monde-étrange, refusait de m’adresser la parole. Bhdra s’engagea à lui laisser un mot dans le carnet à mon propos. Connaissant l’entêtement de la personnalité dont Omi était la copie, j’eus peu d’espoir que ça aboutisse. Je me demandai si Vesy désirerait le même genre de discussion avec Zû, et si la môme la lui accorderait.

Le temps de débriefer tout ça, l’assemblée s’était dissoute et le matériel rangé. Je saluai les derniers partants, empochai un Service bien mérité de la part d’Eret Mancini qui semblait toutefois considérer que je n’avais pas fait le job, envisageai de faire un signe de main à ma mère et y renonçai.

La méduse me fit sursauter en me criant dans l’oreille :

— Alors quoi, on y va ?

— Décidément, il va falloir que tu changes de voix.

— On rentre chez toi ? Tu as une chambre pour moi ? J’espère que tu ne t’attends pas à ce que je dorme par terre ! Oh, au fait j’ai profité de l’assemblée pour présenter mon cas et je suis une personne officielle maintenant.

Un tel sens de l’à-propos me fit regretter sa période parasitaire. J’éclatai de rire, lui expliquai que je ne me moquai pas exactement d’elle, la félicitai d’une tape dans le dos, et la ramenai à la maison.

Un sentiment étrange me soufflait que le nycthémère était empli de promesses, que l’avenir amènerait de nouvelles affaires et de nouvelles raisons de vivre, et que tout serait bien qui finirait bien.

Puisque mon instinct est excellent, je décidai de lui faire confiance.

FIN



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